L’exécution provisoire d’un jugement peut-elle être arrêtée ?

L’exécution provisoire peut être arrêtée si il elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives

LEGAL-SCOPE|LOGO © www.legal-scope.fr 21.12.2018• Par journaliste. Article mis à jour le 21.12.2018• /article publié édité et mis en une par la rédaction. MEDIASCOPE

L’exécution provisoire peut être arrêtée si il elle risque

d’entraîner des conséquences manifestement excessives

CA Paris, pôle 1 – ch. 5, 15 nov. 2018, n° 18/17686. Lire en ligne :

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Juridiction : Cour d’appel de Paris
Numéro(s) : 18/17686
Décision précédente : Tribunal d’instance de Paris, 31 mai 2018, N° 11-18-34
Dispositif : Déboute le ou les demandeurs de l’ensemble de leurs demandes

Corine RUIMY
Anne-Sophie MERLE
Parties :
SCI INDIA
Texte intégral
Copies exécutoires

République française

délivrées aux parties le : Au nom du peuple français

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 5

ORDONNANCE DU 15 NOVEMBRE 2018

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/17686 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B6B5F

Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 Mai 2018 -Tribunal d’Instance de PARIS 08 – RG n° 11-18-34

Nature de la décision : Contradictoire

NOUS, Bernard CHEVALIER, Président, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assisté de Cécilie MARTEL, Greffière.

Vu l’assignation en référé délivrée à la requête de :

Monsieur A B X, Madame D Y-Z

Représentés par Me Anne-Sophie MERLE, avocat au barreau de PARIS, toque : J027

DEMANDEURS

la SCI India

Représentée par Me Corine RUIMY, avocat au barreau de PARIS, toque : D1649

DÉFENDERESSE

Et après avoir appelé les parties lors des débats de l’audience publique du 11 Octobre 2018 :

Par jugement rendu le 31 mai 2018, le tribunal d’instance de Paris 8e, dans le litige opposant la SCI India à M. X et à Mme Y Z, a :

— constaté la résiliation du bail intervenue par suite du jeu de la clause résolutoire le 25 janvier 2017, ordonné l’expulsion des locataires et autorisé la séquestration des meubles,

— condamné solidairement les défendeurs à verser à la SCI India :

— une indemnité d’occupation égale au montant du loyer et charges jusqu’à la libération effective des lieux,

— la somme de 87 990,47 euros au titre des sommes dues au mois de mars 2018, en deniers ou quittances,

— la somme de 1 euros de dommages et intérêts,

— condamné la SCI India à payer à M. X et à Mme Y Z la somme de 3 422,12 euros en réparation de leur préjudice de jouissance et ordonné la compensatino de cette somme avec celle due par les locataires,

— condamné in solidum M. X et Mme Y Z à payer à la SCI India la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens, dont le coût du commandement de payer et de l’assignation.

Il a ordonné l’exécution provisoire du jugement.

Le 6 juillet 2018, M. X et Mme Y Z ont fait appel de cette décision.

Par acte en date du 30 juillet 2018, ils ont fait assigner la SCI India sur le fondement de l’article 524 du code de procédure civile devant le premier président de la cour d’appel de Paris afin d’obtenir la suspension de l’exécution provisoire de la décision précitée et qu’il soit statué ce que de droit sur les dépens.

A l’audience du 11 octobre 2018, la partie requérante a fait demander oralement le bénéfice de son assignation dans laquelle elle expose en substance ce qui suit :

— ils ont de bons espoirs de voir infirmer le jugement en cause en ce qui concerne le montant de la somme mise à leur charge au titre des loyers et des charges ainsi que l’indemnité allouée en indemnisation de leur trouble de jouissance ;

— M. X est âgé de 75 ans et il souffre d’une maladie grave depuis plusieurs années ;

— il est créancier d’un compte associé dans la Sarl Relais de Clichy d’un montant de 185 000 euros.

La SCI India a également fait reprendre oralement les conclusions qu’elle a déposées au greffe, au terme desquelles elle demande à la présente juridiction de débouter les requérants de leurs réclamations et de les condamner à lui payer la somme de 3 000 euros « au titre des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ».

Elle a fait soutenir que les arguments invoqués par les requérants ne démontrent pas que l’exécution du jugement risque d’entraîner pour eux des conséquences manifestement excessives.

MOTIFS

A titre liminaire, il importe de rappeler que la demande de suspension de l’exécution provisoire d’une décision de justice doit être appréciée à l’aune des conditions énoncées à l’article 524 du code de procédure civile et que les motifs exposés par les demandeurs au soutien de leur appel ne sont pas pertinents dans cette instance.

Il résulte de l’article 524, premier alinéa, 2°, du code de procédure civile que, lorsque l’exécution provisoire a été ordonnée, le premier président statuant en référé peut l’arrêter si elle risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.

Ces conséquences manifestement excessives s’apprécient notamment par rapport aux facultés de paiement du débiteur et aux facultés de remboursement de la partie adverse en cas d’infirmation de la décision assortie de l’exécution provisoire.

Le risque de conséquences manifestement excessives suppose un préjudice irréparable et une situation irréversible en cas d’infirmation.

Dans l’affaire examinée, M. X et Mme Y-Z ne démontrent pas à suffisance de droit que l’exécution du jugement litigieux, tant en ce qu’il ordonne leur expulsion qu’il les condamne à paiement, risque d’entraîner pour eux des conséquences manifestement excessives au sens de l’article 524, précité.

En effet, l’obligation de quitter un logement ne constitue pas, en l’absence de toute autre circonstance particulière, une telle conséquence et M. X ne justifie pas des problèmes de santé qu’il invoque ni de l’importance que représente ce logement au regard de ces problèmes. En outre, les requérants ne démontrent pas avoir accompli des démarches afin de se reloger.

Voir aussi : France.com : la justice annule la marque « France », un élément de l’identité de l’état français

En ce qui concerne le recouvrement des sommes mises à leur charge, leur affirmation selon laquelle ils disposent d’un compte associé dans une société d’un montant de 185 000 euros conduit plutôt à penser qu’ils ont les moyens de s’acquitter de leur dette.

M. X et Mme Y-Z doivent, par conséquent, être déboutés de leur demande de suspension de l’exécution provisoire du jugement du 31 mai 2018.

Ils devront supporter la charge des dépens conformément à l’article 696 du code de procédure civile.

Voir aussi : France.com : la justice annule la marque « France », un élément de l’identité de l’état français

L’équité ne commande pas de décharger la SCI India de ses frais de procédure, pour autant que la demande de celle-ci d’une indemnité fondée sur l’article 699 du code de procédure civile puisse être requalifiée comme étant présentée au visa de l’article 700 de ce code.

Voir aussi :  Concurrence déloyale (prescription) / Déchéance de marque ( Cour d’appel de Paris)

PAR CES MOTIFS

Rejetons la demande d’arrêt de l’exécution provisoire du jugement ;

Disons n’y avoir lieu à l’application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons M. X et Mme Y-Z aux dépens.

ORDONNANCE rendue par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

La Greffière, Le Président

Voir aussi : France.com : la justice annule la marque « France », un élément de l’identité de l’état français